Suivant un article paru dans Harvard Business Review, Pierre Breese est [http://breese.blogs.com/pi/2010/06/innovation-killers.html préoccupé] par la prédominance du pilotage d’entreprises par des outils financiers, qui nuirait à l’innovation.
Basiquement, l’argument est que le retour sur investissement de l’innovation est difficile à anticiper, contrairement à d’autres actions de management (développement de marché, gestion de la finance, etc…) ce qui ne pousserait pas les chefs d’entreprise vers l’innovation.
Je ne vois là rien de préoccupant (même s’il s’agit d’un article sorti de H
Suivant un article paru dans Harvard Business Review, Pierre Breese est [http://breese.blogs.com/pi/2010/06/innovation-killers.html préoccupé] par la prédominance du pilotage d’entreprises par des outils financiers, qui nuirait à l’innovation.
Basiquement, l’argument est que le retour sur investissement de l’innovation est difficile à anticiper, contrairement à d’autres actions de management (développement de marché, gestion de la finance, etc…) ce qui ne pousserait pas les chefs d’entreprise vers l’innovation.
Je ne vois là rien de préoccupant (même s’il s’agit d’un article sorti de HBR).
Ce serait préoccupant si les entreprises qui sont pilotées sur la base d’indicateurs financiers et les entreprises qui sont le creuset de l’innovation étaient les mêmes, mais ce n’est pas le cas.
Les entreprises qui créent des innovations sont le plus souvent de petites entreprises, créées, détenues et dirigées par des entrepreneurs innovants qui sont guidés par leur vision et non par les résultats financiers. En un mot, ce sont des start-ups(1).
Je distingue ici une innovation par opposition à une simple amélioration. Par exemple une entreprise qui créerait l’imprimante laser dans le monde des imprimantes à aiguilles innove. L’entreprise qui crée la première imprimante 14 aiguilles, quand celles à 12, 10 et 8 existent déjà ne crée pas une véritable innovation. Toutes les entreprises savent peu ou prou améliorer leurs produits, mais créer une innovation, une rupture, est l’apanage de peu d’entre elles.
La plupart des start-ups ne décollent jamais. Inutile dans ces conditions de se préoccuper d’indicateurs financiers. Celles qui ont la chance de se développer connaissent généralement une phase de croissance foudroyante puisque, par définition, elles avancent dans un marché sans concurrence.
Le destin de ces entreprises est le plus souvent de se faire racheter, car
1) innover et développer un marché sont des métiers différents
2) tôt ou tard, le marché arrive à maturité, et là encore, faire vivre une entreprise (ou une branche d’entreprise) sur un marché mature correspond à un métier et une stratégie différents de la phase de développement.
Quand l’entreprise prend de l’ampleur, le nombre de parties prenantes augmente (actionnaires, mais aussi salariés), et la responsabilité du dirigeant augmente corrélativement. Même pour une baraque à frites (2) , faire du profit est une condition nécessaire à la survie de l’entreprise. Plus l’entreprise est grande, et donc le besoin en capitaux et en travail, plus la responsabilité du dirigeant augmente face à ses employés et ses bailleurs de fonds, et plus son métier s’oriente vers une “industrialisation” des profits, c’est à dire de s’efforcer d’obtenir une marge et une croissance aussi reproductible que possible dans des conditions contrôlées.
Le pilotage sur la base de l’optimisation d’indicateurs financiers a ici tout son sens: si vos concurrents dégagent plus de cash-flow pour une taille et un métier comparable, tôt ou tard ils vous abattront. On ne saurait être plus loin du créateur de start-up poursuivant sa vision…
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(1) Comme en toutes choses, on trouve des exceptions. Une société comme 3M m’impressionne par sa capacité à faire vivre une “usine à nouveauté”, sans doute parce qu’elle laisse à ses employés du temps pour travailler sur les projets qui leur tient à coeur, mais ce genre de contre-exemple est rare.
(2) et je réclame le respect pour cet honorable métier.